Bewegungen Eines Nahen Bergs (Movements of a Nearby Mountain) de Sebastian Brameshuber
Bewegungen Eines Nahen Bergs (Movements of a Nearby Mountain) de Sebastian Brameshuber
Le film trace le portrait de Cliff, mécanicien nigérian qui désosse des voitures pour en revendre les pièces détachées vers son pays natal. Le hangar où il passe le plus clair de son temps est rempli de vieux cadavres de voitures, empilés les uns sur les autres. Perché dans les montagnes autrichiennes, il répète inlassablement les mêmes gestes, comme si sa vie était dictée par cette seule activité.
On entre dans le film de Sebastian Brameshuber au même rythme que la découverte contemplative du hangar de Cliff et du travail qu’il y effectue. Les plans longs, leur relative fixité, l’utilisation d’une courte focale participent de cette impression. L’œil du spectateur se détache du personnage pour arpenter l’espace dans lequel il évolue.
Et dans cette espace un autre personnage : les voitures. Elles sont la colonne vertébrale du film, qui structure la vie de Cliff, et en fait sa routine. Elles contaminent l’espace par des sur-cadrages ; la construction picturale du film est surchargée, obstruée par cette tôle froissée. Le subtil dispositif asynchrone du film ne nous donne rien d’autre à voir que le but vers lequel toute l’existence de Cliff semble dirigée. C’est que le réalisateur prend le soin d’insérer dans certaines scènes de repos quelques plans silencieux, tournés en 16mm, manière de représenter l’écoulement du temps dans la perception de Cliff, ou du moins dans celle du spectateur. Le temps et la succession des journées se trouvent pris dans un bloc d’inertie qui semble traduire l’emprise du travail sur la vie de Cliff. Les moments de travail, les échanges avec les clients ou avec son collègue qui constituent la narration du film, participent de cette inertie. Et dans le dernier quart du film, au Nigeria, pas plus de part d’intimité du personnage, pas de famille, pas d’amis… les mêmes gestes, la même alternance. La vie de Cliff ne semble être ni dramatique ni triste, seulement accaparée par un seul objet, tournée vers un seul but.
Hugo Le Danvic-Santerre
- Prochaine projection : mardi 19 mars à 14h15