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Kindertotenlieder

Virgil Vernier
2021 France 27 min
© PetitFilm
© PetitFilm
© PetitFilm

À partir des archives du journal télévisé, retour sur les émeutes de 2005 en France, survenues suite à la mort de deux jeunes poursuivis par la police.

Kindertotenlieder fait la chronologie des émeutes de 2005 depuis la mort de Zyed Benna et Bouna Traoré, pourchassés par la police, jusqu’au couvre-feu imposé par le Ministère de l’intérieur de Sarkozy. Il emprunte son titre à un ensemble de poèmes écrits par Friedrich Rückert en 1834 après la mort de ses deux enfants et plus tard mis en chansons par Gustav Mahler ; et surtout l’ensemble de ses images aux journalistes reporters de TF1 qui en a, un carton final l’indique, autorisé ici le remploi. Virgil Vernier soustrait en revanche ces images à leur montage et à leur habillage d’origine. Débarrassées des voix-off qui les soumettaient aux fins du récit fabriqué par la télévision nationale dominante, elles se plient aux lois d’une nouvelle structure qui restaure des articulations chronologiques ou sérielles : inventaire des éléments de langage télévisuel ou catalogue des voitures calcinées et des projectiles utilisés. On pourrait dire de Vernier qu’il prend le parti des choses et campe à l’endroit où langage et objets cohabitent dans une proximité inflammable dont jaillissent autant d’idées néfastes que de collisions lumineuses. « On est des voitures pour se laver au karcher ? », demande par exemple ce jeune homme face aux gesticulations vindicatives de l’État. La mesure des propos qui se dégagent de micros-trottoirs étendus au-delà de leurs formats de vignettes tend à la fois à racheter le travail des JRI, comme Jacques Rozier avait su au temps du Mépris racheter celui des paparazzi, et à recentrer la discussion sur la demande de justice et d’égalité qui, lorsqu’elle cherche simplement à s’exprimer, reçoit pour seule réponse une répression inouïe. Presque rendues à l’état de rushes, ces images nous disent que ce film-là n’est jamais fini.

Antoine Thirion

Lire l’entretien avec le réalisateur sur le blog Mediapart de Cinéma du réel

Production :
Petit film (Jean des Forêts, Amélie Jacquis)
Montage :
Charlotte Cherici
Montage son et mixage :
Simon Apostolou

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