48
48 ? les 48 ans de la dictature de Salazar sur le Portugal et ses colonies. Sur fond de photos anthropométriques de la PIDE, la redoutée police politique du régime, des opposants se souviennent. D’un côté l’histoire cachée de ces photos, de l’autre le face à face du bourreau et de sa victime fixé pour l’éternité. La plupart de ces photos sont neutres, inexpressives. Elles parlent surtout de ce qui ne se voit pas – des bourreaux, de leur fantasme de maîtrise absolue, d’anéantissement de l’autre. Derrière ces images monochromes et monotones, tristes et inertes, des voix, celles de ces mêmes personnes photographiées hier par la Pide et qui se souviennent aujourd’hui, devant nous avec leurs mots, leurs peurs, leurs cicatrices, de leur arrestation, des sévices, des tortures, des humiliations, de la prison. Parfois, les photos manquent. Les fichiers ont été détruits ou perdus. À leur place, des plans immobiles, nocturnes, d’arbres, de clôtures. Ce vide est pire que les clichés anthropométriques. Les portraits témoignent encore d’une présence, d’un passage. Les paysages renvoient à une disparition absolue, sans traces, sans témoins. Derrière les voix, l’ombre des fantômes. Et puis dans cette grisaille sans fin, cette répétition terrifiante, un trou, un éclair. L’exception, l’inimaginable : le rire franc, provocant, d’une jeune fille, cette force et cette inconscience merveilleuse de la jeunesse qui sait que la vie lui appartient, que nul ne peut la lui prendre, un sourire radieux, éblouissant, dont on devine combien il a laissé désarmé l’homme en face, puisque le cliché, si peu dans les normes policières, a été gardé. (Yann Lardeau)
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