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Fronterismo

Sofie Benoot
2007 Belgique 43 minutes Anglais; Espagnol

La fin du Pèlerin confrontait Chaplin, évadé de Sing Sing, à un choix redoutable : passer la frontière du Mexique et recouvrer la liberté, mais perdre la femme aimée, ou rester au Texas près de son amour, et retourner au pénitencier. La peur de l’inconnu comme de la prison l’amenait à ne pas choisir et à longer la frontière mexicaine, un pas dans la liberté, un pas dans la prison, un pied de chaque côté d’une ligne invisible et d’autant plus absurde. Soixante-quinze ans après, l’absurdité administrative d’une frontière séparant en deux un territoire identique des deux côtés demeure. Elle s’est même renforcée. La clôture de la frontière entre le Mexique et les États-Unis est pour les autochtones, nantis ou misérables, une aberration, source d’un grave désordre socio-économique et d’une insécurité croissante. Cette frontière n’est pas pour eux une séparation, mais une identité. Fronterismo est une suite de portraits de frontaliers, typés et très différents les uns des autres, du cow-boy au peone et à la couturière. À chaque portrait correspond un aspect de la frontière : une ville divisée en deux où l’on aurait bien du mal à la situer, une voie de chemin de fer, une plaine aride, des falaises abruptes, les gorges du Rio Grande, une bourgade fantôme, une ligne de barbelés et de grillages couvrant l’écran… Des plans larges, amples, d’où ressortent la somptuosité et la diversité d’un paysage, la richesse et la complexité géologiques d’un territoire irréductible à la notion administrative de frontière. Filmer la frontière, ce n’est pas filmer une ligne de démarcation, un trait abstrait, mais un espace qui est d’abord un lieu de passage, c’est-à-dire un ensemble de ramifications, de liens entre une terre et les êtres. (Yann Lardeau)

Production :
Sofie Benoot
Montage :
Nico Leunen; Sofie Benoot
Son :
Senjan Jansen
Photo :
Sofie Benoot

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