Prends, Seigneur, Prends
Plongée intense dans les cérémonies du festival de Panchwa, durant lesquelles les Kalbeliya du Rajasthan dialoguent avec leurs morts – guerriers et déesses – à travers les corps en transe des vivants.
Pendant les cérémonies du festival de Panchwa, les Kalbeliya du Rajasthan dialoguent avec leurs morts – guerriers et déesses – à travers les vivants en transe. Le film s’ouvre et se clôt sur l’autel de briques qui en est la modeste scène, d’abord nue au milieu du désert puis surchargée d’offrandes et de sang sacrificiel. Il restitue l’intensité immersive de ce rituel de chair, de sang, de flammes et de cris – en ce sens, la présence de la caméra est plus que souhaitée, comme si elle parfaisait le spectacle : « Laissez-nous seuls », déclare le prêtre, « sauf les Blancs : ils prennent les images »… Si la création sonore de Jacob Stambach accompagne cette intensité, inversement, le rituel nourrit le cinéma des couleurs des pigments et du sang, suscitant parfois un régime d’images différent. Devant l’autel défilent des possédés qui énoncent leurs doléances, mais ce sont surtout plusieurs médiums, de tout âge, qui offrent leur corps au Seigneur, en une saisissante immédiateté de l’incarnation. Le spectaculaire sert aussi un jeu social, et lorsque le prêtre répond « Tu aurais dû mieux me traiter ! » à un homme qui lui demande « Mon père va-t-il guérir ? », impossible de décider si c’est le notable qui parle ou le Seigneur par sa bouche. Le soupçon d’imposture des médiums, entendu çà et là, isole encore le rituel dans une bulle de croyance aussi fervente que prompte à éclater. (Charlotte Garson)
Lom Nath Panwar; Jérôme Aglibert; TV Tours; Studio Orlando; Matthieu Deniau; Clotilde Massari
Charlotte Tourrès
Gaspard Kuentz
Cédric Dupire