Caught in the Rain
Trois hommes travaillent sur un chantier. Le travail a été interrompu par cinq mois d’emprisonnement. La pluie tombe soudainement comme le silence qui précède une expulsion.
Des hommes sortent des sacs de gravats d’une maison abandonnée. Trient les briques, récupèrent les armatures métalliques, décollent les papiers peints. S’interrompent pour déjeuner, fumer une cigarette, faire une lessive. Brûlent des bandes de papier roulées comme des messages secrets, sortent par les fenêtres, entrent par la porte, se recueillent longuement. Entre deux averses, l’un d’eux raconte comment, un matin, la police est venue l’arrêter. Cinq mois de prison, et le voici de retour dans ce squat bruxellois, où chacun a connu ou connaîtra le même sort, où tous s’organisent collectivement face aux menaces d’expulsion. Cet homme dit sa propre histoire, et dit l’histoire des siens, celle des masses exténuées. Toujours aux aguets d’un bruit suspect, prêtes à déguerpir et à trouver un nouveau refuge. La pluie qui tombe abrite-t-elle leur récit ou annonce-t-elle leur expulsion ? Ces hommes font partie d’un collectif, La voix des sans-papiers, que les jeunes cinéastes Mieriën Coppens et Elie Maissin côtoient depuis plusieurs années et avec lesquels plusieurs films ont déjà été réalisés. Ensemble, ils partagent, selon le mot de Rouch, les films, les luttes. Leurs images ont une vie, une intimité, témoignent d’un travail mené en dépit de toute assurance de pérennité, de stabilité, de solidité. Chaque film est comme la nouvelle pièce d’une maison dont la superficie croît à mesure qu’on en inquiète les habitants. « C’est comme un immense chantier qui émerge dans le brouillard », selon Coppens : manière de dire qu’il se trouve, avec eux, face au plus grand des récits, celui qui semble ne pas avoir de fin.
Antoine Thirion
Cobra Films
Mieriën Coppens
Elie Maissin
Mathijs Poppe, Mieriën Coppens
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