Al Hayat Al Yawmiya fi Qariya Sourriya
“Les villageois ne cessaient de lorgner notre voiture officielle avec crainte, de se méfier de nos instruments cinématographiques complexes mais surtout de faire montre d’appréhension à l’égard de notre curiosité incessante. Les barrières sociales se dressaient haut entre nous. Il nous était parfois impossible de les franchir. Nous avons compris, par la pratique, que notre équipement complexe ne collait pas avec le type d’expérience entreprise et que, de ce fait, nous perdions du temps. Notre travail nous accula, très souvent, à « abandonner » toute esthétique, à garder intact le document filmique. Il nous importait de découvrir la réalité complexe. Nous avons compris que seul le document était majeur. Nous ne prétendons pas que ce film est une image complète de la vie quotidienne de ce village. Nous avons tenté, dans la mesure du possible, à partir d’efforts et d’initiatives individuels de reproduire les principales caractéristiques socio-économiques et culturelles du village qui, probablement, sont semblables, dans leurs lignes de force, à celles des autres villages syriens. Ceci est une première expérience… ” Omar Amiralay, Saadallah Wannousv « Commencer La Vie quotidienne dans un village syrien par une légère tempête de sable où s’inscrit la temporalité de l’effacement et de l’enfouissement est une manière de décrire par l’effet de la nature ce que peut une caméra en filmant quelque espace : c’est l’oeil qui propose à l’imagination une réalité en train de se transformer, d’évoluer, dans le silence habité de musique naturelle. Ainsi se décompose la chronique quotidienne que la présence de la caméra exacerbe, provoque ce qui en elle nichait comme une irritable latence. » Abdelwahab Meddeb, L’icône et la lettre, Cahiers du Cinéma, n° 279-280, 1977 «Vers la fin du film, un paysan du village prend à témoin la caméra, la prend à parti, se sert d’elle et en même temps se livre à elle (car dans un pays comme la Syrie dire ce qu’il ose dire comporte des risques de répression évidents), se livre corps et biens. Son bien à cet instant c’est sa voix, voix de la même veine que la matière sonore dans laquelle elle intervient – voix du même cru -, c’est son capital auquel il fait donner son maximum. Il dit en quelques minutes ce qu’il a sur le cœur depuis des années contre un gouvernement qui permet que sa terre soit confisquée, la sienne, et qui l’assomme pourtant de refus et de slogans démagogiques sur la révolution agraire et le pouvoir des ouvriers et paysans. L’intensité du son de sa voix c’est déterminant : il crie, il en dit trop, il s’arrête, il repart, il enrage ; le timbre, le ton, la force, tout tranche sur l’assurance débile et calculée du discours des bureaucrates interviewés dans leurs bureaux, comme il se doit près de leurs ventilateurs, langue de bois dirigeante et pauvreté prétentieuse des mouvements sonores. Sans doute ce qui donne sa justesse à cette scène, c’est l’ancrage de ces cris (ou de ces discours), l’adéquation de leur amplitude à celle des autres bruits où l’on voit des paysans dans leur vie quotidienne; le fait aussi qu’ils sont produits avec le travail du film. […] Les sons justes, ceux qui sont juste des sons (comme dans ce film) se livrent en bloc, avec leur ambivalence et leur opacité.» Serge Le Péron, La vie quotidienne dans un village syrien, Cahiers du Cinéma, n°277, 1977
Organisme National du Cinéma Syrien; Omar Amiralay; Hazem Baya'a; Abdo Hamzé; Kaïs Al- Zoubaïdi