Allegro Largo Triste
En filmant le musicien sarde Franco Melis, Aurélien Froment ne se contente pas de documenter la pratique du dernier d’une longue lignée de joueurs de launeddas. Il invente une forme qui, sans les singer, épouse rythmiquement les sonates. La succession des séquences permet de découvrir l’étonnant instrument à trois cannes : les indications que donne Melis à un joueur plus jeune nous familiarise avec lui, puis on voit avec quelle simplicité, canif en main, il en fabrique un. Le musée de Cagliari, où est exposée une statuette nuragique de joueur de launeddas, relie le musicien actuel à un passé sédimenté dans le paysage : l’architecture de l’église, où il joue dos à l’autel ; celle des montagnes à l’arrière-plan dans la dernière partie du film, où l’utilisation de la pellicule prend tout son sens. Cadrage et montage ne sont jamais axés sur une spectacularisation du folklore. Ménageant dans les plans-séquence de petits événements visuels, le cinéaste trouve un équivalent à la technique du souffle continu exigée par le launeddas. Quand le cadre s’élargit et que le maître se révèle entouré de 6 autres musiciens, le cercle de la transmission ouvert au début se parachève, et la polyphonie, décuplée, atteint une ampleur inouïe. (Charlotte Garson)
Aurélien Froment, red shoes
Margaret Salmon
Pete Smith
Aurélien Froment
Franco Melis
Isabelle Alfonsi / Galerie Marcelle Alix, Paris • email isabelle@marcellealix.com