Custodi di guerra
Custodi di guerra a pour source des funérailles que l’on ne voit pas : celles des parents du narrateur, récemment retrouvés dans une fosse. «Je pensais avoir tout oublié, mais je me rappelle de chaque instant». Ce retour dans sa terre natale, la Bosnie, réveille en lui des souvenirs et une culpabilité qu’il croyait enfouis à jamais : l’effroi de la guerre, le refus des parents de partir, la panique de la fuite et l’angoisse de l’exil… Au-delà des scènes, des visages, des retrouvailles, c’est ce poids de la guerre dans la mémoire, en soi, que l’homme découvre soudain, ce cancer indestructible, invisible, qui ronge de l’intérieur. La matière de Custodi di guerra est impalpable, elle porte sur un sujet qui n’a pas de référence dans la réalité, qui est hors du temps : la conscience. C’est un film entièrement tourné en conscience. De là cette voix sans corps errant dans l’intérieur délabré d’une maison en ruine, vide, aux murs rongés par la moisissure, au papier peint déchiré, aux volets branlants, au milieu de photos noir et blanc racornies et jaunies, la demeure familiale quittée il y a vingt ans, un panorama irrémédiablement corrompu et disloqué, à l’image de la psyché. À ce récit peuplé d’êtres mais sans corps, doublé d’une maison sans vie, fait écho un flux d’images vidéo tournées sur place en 1980, du temps de Tito, images délavées, décolorées et déliquescentes, muettes, à deux exceptions près, au bord de l’évanouissement, mais peuplées : des images ordinaires d’un village paisible, avec ses piétons, ses voisins, ses automobiles et ses camions où la guerre n’existe pas : images irréelles d’ombres blanches sans voix. (Yann Lardeau)
Ventura Film
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