Gharsallah, la semence de Dieu
Il en va de Gharsallah comme de Keyser Söje dans Usual Suspects. Tous en ont entendu parler, tous ont quelque anecdote terrifiante à raconter sur lui, ou vu des gens qui connaissaient des gens qui connaissaient… mais plus la légende enfle, plus le personnage reste insaisissable, irréel. À Dhibet, petit village de Tunisie, Gharsallah (« la semence de Dieu »), six ans après sa mort, reste un mystère. Bien plus, le mystère s’est fait légende. Fou errant ou prophète injuste, saint coléreux ou manipulateur patenté, éducateur ou despote, guérisseur ou charlatan, sage ou excentrique, possédé ou misanthrope, marabout redouté ou ermite caractériel, l’homme continue d’alimenter les conversations, de nourrir les récits et les fantasmes. Hommes et femmes le voient dans leurs rêves, les actes qu’on lui attribue relèvent du fantastique, du miraculeux, de l’épouvante ou de la provocation. Des conditions de naissance exceptionnelles ont réservé à Gharsallah un destin à part. Mais l’imaginaire et le réel, le flou des souvenirs et le goût du conte sont ici inextricablement liés et indémêlables. À vrai dire, la réalité de l’homme compte moins ici que la terre où il a vu le jour, et la mentalité des hommes qui l’habitent : une terre aride dominée par le mausolée que Gharsallah a construit à la fin de sa vie, un édifice refermé sur lui-même sans ouverture sur le monde extérieur, et une communauté au verbe riche, habile à traduire ses émotions, ses interrogations, ses peurs en des images puissantes, à recouvrir cette terre d’un manteau magique dont la nature l’a privée. (Yann Lardeau)
Gsara
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