KELLY
Il est des rencontres qui portent des entretiens filmés au-delà du portrait : celle de la réalisatrice avec Kelly en fait partie et la justesse du cadrage, l’acuité de l’écoute, y sont palpables dès les premiers plans. Péruvienne qui a vécu en Guyane française et attend à Tanger de passer en Espagne, Kelly semble douée pour ressaisir son histoire mouvementée, que ce soit en dessinant son trajet de l’Amérique du sud au Maroc ou en racontant son premier amour, son expulsion de Guyane, sa prostitution. La beauté des plans sur les environs et les toits de Tanger qui alternent avec cette conversation tout en communicant physiquement avec eux (Kelly parle d’une chambre ouverte sur une terrasse, entre linge et forêt de paraboles TV) accroît encore l’ampleur de son récit : toute jeune encore, Kelly est une aventurière des frontières, rompue aux expulsions, aux arrestations, habituée aussi, sans doute, à l’idée d’un mariage blanc. Mais ces paysages où la mer, toute proche, met la côte espagnole à portée de regard, entrent aussi en contrepoint avec l’espoir dont Kelly fait preuve – espoir juvénile où l’enfantin confine à l’infantile : ce Tanger qu’elle quittera ou pas est celui des « brûleurs », des futurs clandestins confinés dans le temps indéfini de l’attente. (Charlotte Garson)
Les Films de la Caravane; Survivance
Saskia Berthod
Stéphanie Régnier
Stéphanie Régnier
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