Los que desean
Deux listes de noms encadrent le film vif et gracile d’Elena Lopez Riera. Par haut-parleur, l’arbitre d’une compétition de colombiculture détaille d’abord les sobriquets plus ou moins fantasques – Ford Fiesta, Festival, I’m Unemployed – des pigeons multicolores qui viennent de s’élancer dans une course fondée non sur la rapidité mais sur le désir ; désigné vainqueur celui qui aura le mieux su approcher la femelle partie avant eux. La seconde litanie, de la voix même de Lopez Riera, s’éteint sur des paysages au crépuscule, ceux du sud de l’Espagne où ces compétitions ont lieu : ce sont les prénoms des propriétaires des pigeons qui, après les avoir préparé à concourir à travers un certain nombre d’étapes que le film énumère en partie, les ont regardé ensemble et en silence pendant deux heures voltiger au-dessus des champs. L’ordre de ces inventaires dit bien la délicatesse et la ruse d’Elena Lopez Riera. Pour observer les hommes de sa région natale d’Orihuela et le pacte tacite qui les lie, il lui faut regarder au préalable dans la même direction qu’eux, où se tourne leur désir. C’est le propre des métaphores que de décoller des choses qu’elles désignent pour voltiger brièvement au-dessus d’elles : sans rien cacher de la brutalité d’un jeu fondamentalement cynégétique, celle-ci en décuple aussi toute la grâce et la beauté.
Antoine Thirion
David Epiney (Alina Film)
Philippe Azoury, Elena López Riera, Giuseppe Truppi
Elena López Riera , Mateo Menéndez, Marcelo López Riera
Raphaël Lefèvre
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