Parador Retiro
L’hospice est un vaste entrepôt séparé en deux par une cloison d’armoires métalliques, d’un côté le dortoir, « espace privé », de l’autre la cafétéria, « espace public », où les pensionnaires se retrouvent pour discuter, ou regarder la télévision. Contre un mur une petite bâtisse blanche, avec deux fenêtres donnant sur le dortoir, siège de l’administration, des services sociaux, de l’infirmerie. A mi-hauteur, une plateforme où l’on sert les repas. L’espace panoptique, la transparence de l’intérieur contrastent avec l’aspect extérieur du bâtiment, un mur de brique sans ouverture, sinon une porte étroite, surmonté d’une baie vitrée grillagée et si élevée que la lumière a du mal à y pénétrer. Cette absence de communication entre l’intérieur et l’extérieur est sans doute destinée à protéger l’intimité des pensionnaires de l’établissement, SDF, toxicomanes, anciens détenus ou psychotiques, alors même que cette intimité leur est refusée à l’intérieur, mais pratiquement elle dissimule à la société une concentration insupportable de misère et de détresse sans issue. D’ailleurs à quoi bon vouloir sortir puisque dehors le désespoir est le même, mais dispersé, éparpillé, chiens errants de poubelle en poubelle, clochards endormis au coin des rues, pluie et nuit éternelles ? La protection de l’asile a un prix : l’enfermement. Le Parador Retiro projette sur ses murs une exclusion et une relégation que chacun porte en soi. Sa clôture sur lui-même en fait un double de notre monde. Comme Los Olvidados, Parador Retiro a son aveugle reclus qui peine à trouver sa place : il n’est peut-être pas le plus mal loti. (Yann Lardeau)
Cine Ojo
Salvador Savarese; Diego Arevalo Rosconi
Carlos Olmedo; Pablo Demarco; Lena Esquenazi
Gabriel González
Cine Ojo