Querida Mara, cartas de un viaje por la Patagonia
Ces lettres sont celles d’un travailleur saisonnier à sa femme. Parti pendant six mois travailler dans les grandes fermes de Patagonie, sur la « route de la laine », il y relate son quotidien : d’interminables voyages, tassé au fond d’un bus, toujours plus loin dans une terre dénudée et glacée, à tondre des moutons et encore des moutons pour un salaire de misère, à dormir comme une bête dans une grange, l’arrogance et l’avarice des propriétaires, les ententes sur son dos entre les intermédiaires et les propriétaires. Il y décrit ses compagnons d’infortune : la plupart originaires de la province de Corrientes, l’une des plus pauvres d’Argentine ; quelques descendants des Indiens Mapuches aussi, décimés par l’armée au XIXe siècle, faciles à berner parce qu’ils ne savent pas lire. Cette découverte de l’immensité d’une terre et de ses paysages grandioses et inhospitaliers, de la côte aux montagnes enneigées, en passant par la reconstitution ahurissante d’un chalet suisse, est aussi un voyage dans l’histoire du peuplement de l’Argentine et de ses luttes sociales. C’est surtout un terrible constat d’échec : celui d’une immigration qui n’a pas tenu ses promesses, qui s’est soldée par un appauvrissement des familles quand elle aurait dû les enrichir, et qui pousse aujourd’hui les hommes à émigrer de nouveau dans les terres les plus reculées du pays, et sans perspective d’enrichissement. Un minibus perdu dans l’infinitude d’un paysage quasi désert, sur une route qui ne mène nulle part : c’est la désolation d’un paysage intérieur que nous décrivent ces lettres. C’est aussi la tristesse d’un visage défait : celui de l’Argentine en ce début de siècle. (Yann Lardeau)
Carlos Echeverria
Alejandro Brodersohn; Jose Luis Romano
Alexis Jorquera; Laura Linares
Carlos Echeverria