SACRO GRA
Après le « passeur » de Bénarès en Inde (Boatman, 1993), les États-Unis et ses naufragés dans le désert dans Below Sea Level (Grand Prix Cinéma du réel en 2009) et le tueur mexicain d’El sicario (2010), Gianfranco Rosi serait-il fatigué de voyager ? La réponse est catégoriquement négative. Si le cinéaste italien, né en Érythrée, filme dans son propre pays, il le fait justement sous le signe du voyage et de la rencontre d’une forme d’altérité. En s’attachant précisément à un motif du déplacement : le GRA (Grande Raccordo Anulare), l’anneau circulaire périphérique de Rome. Un choix qui induit celui de la marge au détriment du centre. Fruit d’une immersion de deux années, le film habite cet espace en étant comme pris en tenaille entre deux mouvements contradictoires : la déambulation et l’arrêt — sur des lieux et des personnages que l’on suit et retrouve en alternance ; un botaniste, une équipe d’ambulanciers, un érudit et sa fille, un prince moderne. Grâce à la qualité de présence, de regard et d’écoute de Gianfranco Rosi, le prosaïsme est transfiguré en un conte, le singulier devient un monde en soi. La forme circulaire prend des airs de cosmos fragile, où le poétique dialogue avec le politique.
Arnaud Hée
DOCLAB; La Femme endormie
Alfama Films production
Jacopo Quadri
Giuseppe D'Amato; Stefano Grosso; Gianfranco Rosi; Riccardo Spagnol
Gianfranco Rosi
Doc & Film International