Tout l’or du monde
Tout l’or du monde est d’abord le portrait croisé de deux hommes : un vieil ingénieur en fin de carrière, passionné par son métier et qui n’a pas d’au-delà , et un vieux griot attaché à transmettre la vérité de sa terre. L’un a réussi professionnellement mais échoué dans sa vie, l’autre dans la perpétuation de son monde. L’or, pas plus que l’argent, ne fait le bonheur. Le film confronte deux rapports inconciliables à l’or, le matérialisme et la cupidité de l’Occident, la tradition et les valeurs spirituelles de l’Afrique. « Dieu a créé l’or, mais les Blancs en connaissent l’usage. Les Noirs l’ignorent. Nous ne savons que l’admirer. Les Blancs connaissent son prix et son importance sur terre et au-delà. » C’est moins un affrontement entre Noirs et Blancs, pauvres et riches, paysans et industriels, village et technologie que filme Robert Nugent, qu’une incompréhension majeure du capitalisme face à tout ce qui ne lui ressemble pas. A Bornéo ou en Guinée, la compagnie se comporte de la même manière, elle a le même rapport utilitariste à la terre. La compagnie minière se veut écolo et sociale, soucieuse de la protection de l’environnement et porteuse de progrès pour les territoires qu’elle contamine. Mais elle ignore les objections et le mécontentement croissant de paysans chassés manu militari de leurs terres : les routes coupées qui les empêchent d’aller travailler dans les champs, les conséquences pour les familles de l’interdiction de l’orpaillage, la non-embauche sur le chantier des paysans, la non-redistribution du travail et des richesses. Elle ne mesure pas l’ampleur du changement qu’induit sa présence. Les villageois disent la fin d’un monde miné par la misère et l’appt du gain : « Avant on faisait de l’or des bijoux. Aujourd’hui des voleurs vous couperaient les oreilles… Nos esprits protecteurs nous ont abandonnés. » (Yann Lardeau)
Looking Glass Pictures; Trans Europe Film
Doc & Co
Andrea Lang
Erik Ménard
Robert Nugent; Laurent Chevallier