Xianshi shi guoqu de weilai
Des pattes d’ours au milieu des surgelés d’un supermarché, un alligator en cavale, des cochons lâchés sur une rocade, un homme pêchant dans les égouts, un bébé abandonné dans un terrain vague, un incendie qui repart sitôt que les pompiers ont quitté le site, un égaré dansant au milieu d’un autoroute, Disorder est un montage parallèle de faits divers filmés, avec talent, par des amateurs que Weikai Huang a rassemblés en un mouvement unique, au noir et blanc granuleux, pour composer un hymne à Canton, à la fois cruel et cocasse, violent et absurde. Ces images rappellent, par leur brutalité et leur contraste, le New York de Weegee. Par leur genèse aussi : ces reporters amateurs bénéficient souvent du concours des institutions, des pompiers, des urgences des hôpitaux, de la sécurité routière, pour se retrouver sur place au moment même de l’événement. Il s’ensuit un regard plus proche, plus spontané — et plus sincère — sur l’événement que le discours réchauffé et codifié des actualités télévisées. Si ces images sont indéniablement motivées par la quête de l’insolite, elles ne sont cependant ni voyeuses ni complaisantes. Les caractérisent plutôt l’étonnement, le déséquilibre, la déraison dans la raison, le désordre : ce moment fragile où l’ordre bascule et se transforme en son contraire identique à ce point au cœur du yin et du yang qui amorce le vacillement de l’un dans l’autre. Ce renversement des forces anime d’ailleurs le mouvement même du film. Plus le film avance, plus le désordre gagne… (Yann Lardeau)
Weikai Huang
Weikai Huang
Weikai Huang