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DIZ A ELA QUE VIU CHORAR de Maira Bühler

DIZ A ELA QUE VIU CHORAR de Maira Bühler

São Paulo, Brésil. 

Le centre de la ville est un mélange de misère et de réussite sociale: il y a le quartier des affaires aux immeubles prestigieux d’un côté et de l’autre un centre historique témoin des richesses passées et du désordre d’aujourd’hui. Les grands propriétaires possèdent toute la ville mais n’en font rien. La ville connaît une grande crise du logement, des immeubles entiers sont délabrés, désertés, squattés par des familles sans toit ni terre. Certaines de ces rues sont envahies par le crack, les gens ne s’y aventurent pas de peur de croiser des regards vitreux et les corps aux mouvements saccadés ou inertes de ceux tombés dans la spirale. 

Dans son film Diz a ela que viu chorar, María Bülher nous projette dans ce monde. Le plan d’ouverture nous pose sur un lit, à côté d’un accro fumant son caillou. Le décor est posé, on ne quittera pas les murs de cet immeuble. On devine parfois au loin la ville à travers le grillage qui recouvre les fenêtres. Dans ce décor austère éclairé au néon blanc, le cadre toujours serré nous tient au plus près de visages éveillés, marqueurs d’histoires de vie difficiles.

María Bülher propose ici un film choral passant de chambre en chambre. Les habitants de ce drôle d’endroit se croisent dans l’ascenseur, les cages d’escalier, les couloirs ou la terrasse, la caméra en profite pour changer de trajectoire et rentrer dans l’intimité d’une personne, d’un couple, d’une conversation… Moments de lucidité, de poésie suivis de basculements vers la violence, jusqu’à des frénésies effrayantes. L’immeuble est en effet comme un huis clos où cohabitent ces gens dictés par le produit : ils s’aiment, se battent, s’entraident. Théâtre de la passion. L’amour y est doux, tendre, idyllique. Mais les différents tournent aux coups. Et l’abandon de l’être cher transforme leur visage maintenant tordu par la terreur de perdre cette promesse de tendresse.

Bien que les situations dégénèrent parfois, Maíra Bülher impressionne par le maintien de ses plans fixes, témoins, provocateurs par leur raideur. La caméra semble protégée, acceptée et même guidée par les protagonistes dans leur quotidien, leurs tourments et leurs espoirs d’avenir. Une mise à nu qui bouleverse les idées reçues.

Lola Balsas Jorge

  • Prochaine projection le samedi 23 mars à 16h30