Die Geträumten
Ingeborg Bachmann et Paul Celan ont 22 et 27 ans lorsqu’ils se rencontrent à Vienne, en 1948 ; poètes tous les deux, ils n’ont ni les mêmes origines (Celan, juif de Czernowitz, a perdu ses parents dans un camp allemand en Ukraine), ni la même renommée. Leur correspondance amoureuse est marquée par la distance, et de plus en plus, par la paranoïa du côté de Celan. Die Geträumten en restitue la beauté déchirante en filmant deux jeunes gens qui l’enregistrent dans un studio, debout devant leur micro. Les compositions du caméraman Johannes Hammel traduisent visuellement l’intimité paradoxale entre les deux poètes. Peu à peu, les interprètes, Anja Plaschg (musicienne connue de la jeune scène autrichienne) et Laurence Rupp (membre du Burgtheater), semblent se laisser gagner émotionnellement. Leurs pauses-cigarette laissent apparaître les préoccupations de leur âge, mais la correspondance Bachmann/Celan infuse lentement leur relation, sans que jamais cela ne soit verbalisé. Ce qui s’échange dans leurs regards, la tonalité de leur voix, la façon dont ils prononcent une prose qui n’est pas celle de leur génération, permet aisément de comprendre pourquoi Ruth Beckermann, qui devait au départ alterner les lectures avec les lieux où les amants ont vécu, a recentré Die Geträumten sur ce gracieux Kammerspiel où le romanesque de l’épistolaire nourrit le présent documentaire. (Charlotte Garson)
Ruth Beckermann Produktion
Dieter Pichler
Georg Misch
Johannes Hammel
Austrian Films