End of the Season

Vers la fin de la saison, un groupe de cueilleurs de champignons « matsutakés » part à la recherche de ces rares trésors souterrains dans le Haut désert de l’Oregon, sur la Chaîne des Cascades.

Lorsque Jason Evans arrive dans l’Oregon pour filmer la cueillette des champignons, il ne trouve plus que quelques ouvriers sur place : la saison est presque terminée. De cette atmosphère languissante, il tire tout le sel. Les quelques cueilleurs sont relégués à l’arrière des plans. Le regard est décentré, traitant à égalité homme, tronc d’arbre et extincteur. Si notre espèce marque son territoire de façon plus visible, la nature qui l’environne peut difficilement aujourd’hui être vue comme un cadre indifférent. On le sent, elle poursuit silencieusement son œuvre, envers et contre la nôtre. Dans des plans fixes soigneusement composés, tournés en noir et blanc, le réalisateur se pose en observateur tiers, ni d’un côté, ni de l’autre. Il regarde les objets abandonnés par les hommes avec la curiosité d’un animal qui furète, ici un cintre en plastique, là une cabane éventrée. La cueillette elle-même est peu visible, car ce qui intéresse le cinéaste n’est pas tant la nature du travail que l’écosystème dans lequel il s’inscrit. Plutôt qu’à la tâche, on accompagne donc les travailleurs dans leur tente, lorsque vient le moment de concocter un repas. Les visages aperçus et la musique entendue laissent deviner des origines lointaines. Sans doute les Américains ne sont-ils pas les mieux placés pour perpétuer l’idéal historique d’une vie autosuffisante, fondée sur la récolte respectueuse des fruits de la nature. Ici, à l’écart des villes et presque hors du temps, on perçoit la survivance d’un mode de vie immémorial, faisant feu de tout bois.

Olivia Cooper-Hadjian