Reveka
En Bolivie, quatre mineurs d’une petite concession familiale descendent chaque jour dans les entrailles de la « mangeuse d’hommes ». Le Cerro Rico a englouti des millions de mineurs depuis cinq siècles, esclaves indiens et africains puis indigènes sous domination espagnole. Dans le splendide panorama qui ouvre le film, un orage se prépare, mais ce sont des détonations de dynamite que l’on entendra. Les mineurs comptent le nombre d’explosions pour ne pas revenir trop tôt. L’archaïsme de cette technique périlleuse n’a d’égal que la lucidité de chacun quant à la probabilité d’un accident. C’est d’abord par leur travail sur l’ombre et la lumière que les réalisateurs suggèrent la fragilité du site et des hommes – un feu allumé près du puits, ou la pénombre de l’enfer intérieur. L’immense montagne, on l’apprend dans le journal, menace de s’effondrer. Bientôt la vulnérabilité se lit partout, au cimetière des silicosés, et même chez le tatoueur, dont l’aiguille a des allures de marteau-piqueur miniature. Reveka (Rebecca), le nom de la concession que dirige Hilarion, est hitchcockien et hanté malgré lui : le mineur est persuadé que les âmes des collègues écrasés continuent d’errer. La peur s’invite jusqu’à la table familiale ; est-ce un hasard si la fille du mineur lit Les Trois Petits Cochons, qui changent maintes fois de maison en quête d’une illusoire solidité ? (Charlotte Garson)
Playtime Films
Pierre Duculot
Mathieu Haessler
Leny Andrieux
Benjamin Colaux; Christopher Yates
Wallonie Image Production