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Rock Bottom Riser

Fern Silva
2021 États-Unis 70 min

Tandis que la lave continue à jaillir du centre de la terre sur l’île d’Hawaï – présentant un péril imminent –, une crise couve. Des astronomes prévoient de construire le plus grand télescope au monde sur Mauna Kea, la montagne la plus sacrée et la plus vénérée d’Hawaï. En se basant sur l’histoire séculaire de la navigation polynésienne, sur l’arrivée des missionnaires chrétiens, ainsi que sur la capacité de l’observatoire à rechercher les origines de l’univers, le film s’intéresse à l’influence du colonialisme, à la recherche de formes de vie intelligentes et à la découverte de nouveaux mondes, tout en observant attentivement l’existence de notre propre planète.

Aucune trace de Bill Callahan dans la bande-son de Rock Bottom Riser, bien que Fern Silva ait repris à l’une de ses chansons le titre de son premier long métrage, où vapeurs, fumées, éruptions et autres phénomènes pyroclastiques tiennent une place prépondérante. Ce sont Simon et Garfunkel qu’on entend à la place chanter ce refrain – « I am a rock, I am an island » – que le film semble alors reprendre à son compte. Refrain facétieux, car si nul homme n’est une île, nulle île ne saurait nier ses relations d’interdépendance : la connaissance de ces relations définit précisément l’intelligence insulaire. C’est le nœud complexe de ces relations qui attirent Fern Silva à Hawaï, au moment où un télescope de trente mètres, fruit d’une coopération internationale au montant astronomique, menace de s’installer sur la montagne sacrée de Mauna Kea, et rencontre une forte opposition locale dont l’acteur Dwayne Johnson – The Rock – se fait le porte-voix, revêtant sans doute déjà un peu l’habit du roi Kamehameha qu’il s’apprête à jouer dans un prochain film de Robert Zemeckis. Le film entier est à l’image de l’extraordinaire palimpseste de cette situation. S’appuyant sur les savoirs ancestraux de la navigation polynésienne, le récit des missions d’évangélisation, les recherches d’intelligences extraterrestres et d’autres planètes habitables conduites par l’observatoire à mesure qu’un manteau de lave menace toujours plus de recouvrir les plaines habitées, Rock Bottom Riser explore le syncrétisme d’Hawaï et l’influence d’un colonialisme renouvelé par la science, sous la forme d’un flot continu qui transforme ses différents fragments en un seul bijou rougeoyant.

Antoine Thirion

Lire l’entretien avec le réalisateur sur le blog Mediapart de Cinéma du réel

Production, image, son, montage :
Fern Silva
Musique originale :
Sergei Tcherepnin
Musique originale additionnelle :
Lea Bertucci

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