Le Battement d’ailes d’un papillon
Alexander Kluge aime à dire que le cinéma, ce n’est pas la vérité 24 images par seconde, mais l’obscurité 24 images par secondes, 1440 absences à la minute. Ce qui donne un autre statut à la vérité. Un trou noir dans lequel l’image animée s’évanouit et d’où surgit le mouvement. Ce battement fugace, semblable aux ailes d’un papillon, Alexandre Balagura pose qu’il est au cœur de la représentation cinématographique, non seulement comme matrice, mais comme objet, comme contenu, sous une forme transposée, fétichisée. Les chronophotographies de Muybridge (la fessée, la toilette), le théâtre et ses ombres, la jeune fille, le rêve et la mort, Nostalgia de Tarkovski, un ami disparu, un film collectif inachevé, égaré dans les studios de Kiev, un trou de mémoire dans un train, le plan cinématographique conçu comme une superposition de filtres, un empilement de voiles, la première image, le visage trouble, en surimpression, de la mère, l’isba de la grand-mère avec son icône dissimulée derrière une cloison et son tableau naïf de la mère et de l’enfant dissimulant le compteur électrique, la photo d’une belle inconnue, la perte est au centre du Battement d’ailes d’un papillon avec ce qu’elle nous enseigne de l’amour. L’émerveillement de l’homme devant l’image-mouvement procède non d’un effet mécanique, d’une illusion d’optique, mais de ce qui s’y joue 24 fois par seconde l’énigme du désir. Nostalgie inépuisable et mélancolie infinie. (Yann Lardeau)
Gie Meichler/LGM
Alexandre Balagura
Alexei Salov
Nicolas Rey
Gie Meichler/LGM