Le Patron est mort
« …Assurément la propagande est l’ennemie de l’art. L’étonnant, l’émerveillant même, est qu’elle soit bannie du très beau film réalisé par Henri Storck, Le patron est mort. Pourtant il montre les obsèques solennelles d’un homme politique, Emile Vandervelde, figure dominante du Parti ouvrier belge. Vandervelde, d’évidence , fut une sorte de saint laïc de la génération barbichue, un bourgeois intellectuel qui donna sa vie à la classe soumise. Quelques extraits de ses allocutions complètent le reportage (« les ouvriers ne sont pas des enfants ») et font comprendre mieux l’émotion d’un pays qu’on dirait rassemblé tout entier pour ses funérailles. La vie de Bruxelles est arrêtée. Les lampadaires, allumés en plein jour, ont été voilés de crêpe. Des dizaines et dizaines de milliers de gens se tiennent muets sur le passage du cortége, chacun saluant la dépouille selon ses convictions. Le plus mémorable demeurant la cérémonie même, qui révèle l’existence d’un rituel socialiste, et tel en somme qu’un chapitre méconnu de l’ethnologie ouest-européenne… »
Maurice Naessens
Fonds Henri Storck