Les Proies
Dans la forêt des Landes de Gascogne, des cages à oiseaux sont hissées en haut des arbres à l’aide de poulies. Un homme aux aguets attend le moment opportun pour tirer des ficelles dans une grande cabane basse camouflée sous les aiguilles de pin. Étrange et fascinant théâtre sylvestre… Faisant fi de tout commentaire, Marine de Contes restitue une pratique dans sa complexité rituelle. Citadine et femme, donc doublement étrangère, elle retient son souffle en même temps que le petit groupe de guetteurs. Sans rejeter son statut de documentaire ethnographique sur les techniques, l’espace et les mots de la chasse à la palombe, Les Proies s’intéresse aussi à la communauté qu’elle maintient, au liant identitaire entre les générations et à la répartition entre les sexes (les femmes ne font visiblement que passer). L’attente fait partie intégrante de la chasse, qu’on la comble en s’initiant, octogénaire, à Candy Crush sur un smartphone, ou que l’on se raconte des histoires en gascon. Cette attente semble d’autant plus fructueuse pour la cinéaste qu’elle apparaît bientôt comme un miroir à sa pratique documentaire : qui tourne sans scénario ne monte-t-il pas lui aussi un dispositif apte à piéger l’événement, à épouser le surgissement visuel et sonore d’un passant furtif dans le champ ? Si de loin en loin, le bruit inquiétant de l’abattage d’un pin laisse deviner que la chasse à la palombe ne sera bientôt plus qu’un souvenir folklorique, un passage de relais, métaphorique du moins, a eu lieu. (Charlotte Garson)
L'Atelier documentaire
Gabriel Roman
Vincent Brunier
Marine de Contes
L'Atelier documentaire • email atelierdocumentaire@yahoo.fr