Un Archipel
« De part et d’autre du canal s’ouvre une vaste plaine où les machines sont à l’œuvre. Elles bouchent des trous, elles déplacent les frontières. La relance est en marche. La démolition est en cours. Des villes différentes et semblables s’étendent à perte de vue. » Autoroutes, centres commerciaux, portes murées : c’est à une collecte véritablement habitée que se livrent les guides d’Un archipel, cartographie mentale et plurielle d’un Est parisien en recomposition. Comme les Aborigènes qui mémorisent les cartes du désert en les chantant, les hommes, femmes et enfants que suivent Till Roeskens et Marie Bouts défrichent pour eux un territoire familier. La musicalité de leur chant inspire celle du montage, qui entrelace à leurs passages secrets une voix off chuchotée rappelant 2 ou 3 choses que je sais d’elle de Jean-Luc Godard. Attentive aux toponymes, la voix reste ludique mais s’infléchit d’accents élégiaques. En inscrivant à même la matière la parole en mouvement des habitants, les cinéastes-plasticiens confèrent à leur geste poétique une portée politique : Un archipel démonte pierre à pierre les clichés médiatiques de la Seine Saint-Denis.
Khiasma
Marie Bouts; Till Roeskens; Dounia Bovet-Woltèche
Xavier Collet
Khiasma