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ALLENSWORTH

James Benning
2022 États-Unis 65 min Langue : anglais

Perdu au beau milieu de la Grande Vallée de Californie, le village d’Allensworth fut fondé au début du XXe siècle par et pour des Noirs américains. Ce film, dont le tournage s’est étalé sur toute une année, convoque implicitement un contexte sociopolitique pour mieux souligner l’importance historique de cette municipalité.


Bien qu’un carton situe d’emblée le lieu que le nouveau film de James Benning décrit – « Allensworth, est. 1908 » – nous ne comprendrons que peu à peu où nous nous trouvons, au cours de douze plans d’environ cinq minutes, qui forment ensemble un cycle d’une année. Après l’image d’un arbre solitaire et nu sous un ciel d’hiver, viennent une série de maisons individuelles et de bâtiments communaux modestement construits en bois ou en tôle ; une étable et un cimetière que personne ne semble plus visiter. Quelques voitures passent sur une route masquée par un talus ; des trains s’annoncent avant, parfois, de traverser le plan ; pour le reste, la vie s’est retirée. Allensworth est, pour l’essentiel, une ville fantôme, un musée. Fondée au début du vingtième siècle, largement désertée après la première guerre mondiale et déclarée parc national en 1974, c’était la première municipalité californienne entièrement gouvernée par des Afro-Américains. James Benning souligne cet héritage en commençant d’inclure à mi-parcours des chansons – « Blackbird » de Nina Simone et « In the Pines » de Lead Belly – ainsi qu’une suite de poèmes de Lucy Clifton, récitée dans une salle de classe par une adolescente habillée d’une robe reproduite sur le modèle de celle qu’Elizabeth Eckford portait sur le chemin de l’école de Little Rock à la rentrée 1957, sous les cris et les insultes de la foule blanche, immortalisée par une photographie sur laquelle le film se conclut. L’apparition fascinante de cette lectrice n’est pas sans évoquer celle de Faustine dans L’Invention de Morel. En dépliant l’image d’une ville fantôme dans une structure cyclique, James Benning invite à penser historiquement le présent, et à se souvenir que lorsque le temps passe, l’inégalité demeure.

Antoine Thirion

Rencontre avec Sharon Lockhart & James Benning autour de leur ouvrage OVERTIME
Vendredi 31 mars à 19h15 – Librairie du Centre Pompidou 
Présentée par Antoine Thirion

Lire aussi l’entretien avec James Benning


James Benning

James Benning a réalisé la première de ses œuvres d’avant-garde en 1972, puis a commencé peu de temps après à produire des films expérimentaux plus longs. Entre 1978 et 1985, il réalise de nombreuses projections et installations informatiques. De 1977 à 1980, il a enseigné à l’université de Californie et celle d’Oklahoma. Depuis la fin des années 1980, il vit à Val Verde, près de Los Angeles. Il enseigne au California Institute of the Arts où, à travers ses œuvres, il continue d’influencer grandement les jeunes générations d’artistes. Le paysage américain est l’un des aspects les plus saillants de son œuvre. À l’aide de plans fixes qui s’établissent dans la durée, les films de Benning traitent souvent de la nature et de la mainmise de l’homme sur le monde.

Production :
James Benning
Image :
James Benning
Son :
James Benning
Montage :
James Benning
Contact copie :
Galerie Neugerriemschneider - dylan@neugerriemschneider.com

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