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Boum Boum

Laurie Lassalle
2022 France 110 min

Je rencontre Pierrot à l’automne 2018. Nous manifestons ensemble au cœur du mouvement des Gilets jaunes. La terre tremble, nous cœurs aussi. Nos corps se mêlent à des milliers d’autres qui expriment leur colère dans la rue tous les samedis.

Pour filmer le phénomène des Gilets jaunes, il fallait dans une certaine mesure, y participer : faire acte de présence sur les ronds-points ou dans les rues le samedi. Car comment définir ce mouvement pluriel et spontané autrement que par cet être-là ? Laurie Lassalle fut de ceux qui occupèrent le terrain à Paris. En voix off, elle interroge son désir d’être parmi la foule, indiscernable de celui d’y retrouver Pierrot. C’est un angle mort des analyses politiques que la cinéaste aborde ici vaillamment : la part irrationnelle des engagements et le caractère mystérieux des soudains embrasements tels que celui qu’a connu la France cette saison-là. Le récit de ses samedis et de l’idylle qui la consume devient la métaphore filée du désir de faire foule face à des hommes casqués. Une expérience qui est elle aussi charnelle, mêlant des pulsions antagonistes : venir se dresser contre les dynamiques morbides imposées par le pouvoir implique aujourd’hui une mise en péril de son intégrité physique. Aidée de Pierrot, qui entame facilement la conversation, la cinéaste sonde d’autres individus qui se sont engouffrés dans la brèche ouverte par les premiers Gilets jaunes pour dire leur appétit d’un monde meilleur. Leurs récits traitent d’espoir politique davantage que de précarité économique, enrichissant l’image qui a pu être donnée du mouvement. Les lacrymos fusent, les LBD frappent. Laurie Lassalle filme les corps qui encaissent, et qui reviennent prendre le risque de finir amochés, comme elle le fait en mettant ses sentiments à nu. L’amour et la révolution sont peut-être des utopies, mais une étincelle contient toujours la promesse d’un incendie.

Olivia Cooper-Hadjian


Lire l’entretien avec Laurie Lassalle

Laurie Lassalle

Laurie Lassalle a vécu une enfance nomade entre la France et le Nigeria. En 2014, elle réalise son premier moyen-métrage de fiction, Les Fleuves m’ont laissée descendre où je voulais, sélectionné à la Semaine de la Critique à Cannes. Puis elle tourne Je suis Gong (Association Mille Visages) avec de jeunes habitants de la Cité de la Grande Borne (multiples festivals, Prix du Jury et Meilleur documentaire au Festival Franco-Arabe). Aujourd’hui, elle co-écrit avec Lucille Dupré un scénario long de fiction et tourne un documentaire à la ZAD NDDL. Boum Boum est son premier long-métrage.

Production :
Mouvement, Les Films de l’œil sauvage
Image, son :
Laurie Lassalle
Montage :
Laurie Lassalle, Raphaël Lefèvre, Catherine Catella, avec la collaboration de Léa Chatauret
Musique originale :
Philippe Monthaye
Contacts copie :
quentin@oeilsauvage.com, jane@jhrfilms.com, mouvement@corsicamail.com

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