Mafioso, au cœur des ténèbres
Les ténèbres arpentées par Mafioso sont d’abord celles, permises par un contre-jour ou une simple cagoule de laine noire, où se dérobe le visage de ses trois protagonistes. Tous ont commis, pour le compte de Cosa Nostra et de son tristement célèbre parrain Toto Riina, une quantité vertigineuse de meurtres ; ayant accepté après leur arrestation de collaborer avec la justice, ils sont désignés depuis lors comme les « repentis » de cette mafia sicilienne démantelée en partie grâce à eux. Une rencontre se poursuit ici, amorcée par Corleone, le précédent film de Mosco Levi Boucault, d’où reviennent sans délai ces mots de l’un deux : « Nous étions vraiment des bouchers. » Voilà les ténèbres qu’explore surtout le film: celles de la conscience de ces « hommes d’honneur », éduqués dans la loi d’un système de mort qui sut faire prévaloir sur toute chose, y compris la vie de leurs proches, leur allégeance à la pieuvre. Corleone, en reconstituant par une minutieuse enquête le parcours glaçant de Toto Riina, rejoignait par sa méthode les fresques minutieuses consacrées par Mosco Boucault au PCF ou aux Brigades rouges. En restant avec les repentis, Mafioso renoue, lui, avec la question que relance son œuvre chaque fois qu’elle se penche au bord de l’abîme creusé par le crime dans une conscience coupable (les meurtrières de Roubaix, commissariat central). Une possible formulation en est donnée ici par le cinéaste lui-même, dont la voix est entendue à cette unique occasion, après qu’un des repentis lui a décrit les atrocités qu’il a commises : « Comment dort-on, après ça ? »
Jérôme Momcilovic
Mosco Levi Boucault est né en Bulgarie en 1946. Émigré en France 1957. Licence de Lettres (Nanterre) 1970. Idhec (Paris) 1970.
Folamour
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