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Intermède

Horiko
Maria Kourkouta
2022 France, Grèce 24 min

Images d’un petit chantier naval, quelque part en Grèce. Entre la réparation de bateaux et leurs nouveaux départs, une équipe d’hommes se charge de les tirer à terre et de les remettre dans l’eau. Un film en 16mm, fait de gestes et de mouvements balançant entre rapprochement et éloignement, attachement et détachement, tension et tendresse.

Si la mer donne à Intermède son horizon, les bateaux eux-mêmes s’y muent en paysages soyeux, rendus luisants par les algues. Le cadre peine à contenir les objets imposants, qui l’envahissent parfois entièrement et que les hommes ceignent de cordes, câbles et chaînes pour mieux les manipuler. Ils les appréhendent comme un environnement qu’ils parcourent de leurs mains et qui les enveloppe de ses sons – grincements et craquements sur fond de ressac. On découvre au générique que les images ont été tournées sur une période de sept ans. Le noir et blanc intemporel de la pellicule 16 mm nous a transportés dans un présent cyclique et apparemment immuable. Une chorégraphie s’y déploie : il faut défier la pesanteur, hisser hors de l’eau les navires fatigués, puis les pousser pour les rendre à la mer. Maria Kourkouta déconstruit la linéarité des tâches pour filmer des rapports de texture et d’échelle, petits bonshommes contre embarcations massives. Le bois, le métal semblent indépendants, animés de mouvements spontanés. Eux aussi travaillent, sous l’impulsion des ouvriers. Agencés par un montage musical, les gestes des hommes impriment aux bateaux le rythme d’une marée : les coques noircies viennent lécher le rivage puis s’en retirent une fois les soins prodigués. Les sels d’argent de l’émulsion photochimique articulent des rencontres de matières, font danser ensemble les vagues et les corps flottants au sein d’un même jeu de forces gravitationnelles. Un poème sensuel se compose, comme pour garder le souvenir de vies encore matérielles.

Olivia Cooper-Hadjian


Lire l’article inspiré par un entretien avec Maria Kourkouta

Maria Kourkouta

Maria Kourkouta est réalisatrice, monteuse et productrice, née en Grèce, en 1982. Après des études d’histoire en Grèce, elle s’est installée en France où elle a mené des études de théorie du cinéma. Elle réalise des films depuis 2010, principalement en pellicule 16mm. Après son court-métrage Retour à la rue d’Éole, en 2014 (Prix ARTE du meilleur film au Festival d’Oberhausen), elle a co-réalisé en 2016, avec la poétesse Niki Giannari, son premier long-métrage documentaire Des spectres hantent l’Europe (Prix du meilleur film au festival de Jihlava). Elle a été membre actif des laboratoires indépendant français (L’Etna, puis L’Abominable) pendant plus de dix ans.

Producteur :
Maria Kourkouta
Image :
Maria Kourkouta
Son :
Claire Atherton, André Fèvre
Montage :
Claire Atherton
Contact copie :
entr.acte95@gmail.com

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