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SAINTONGE GIRATOIRE

Quentin Papapietro
2023 France 13 min Langue : français

En Saintonge, à l’entrée des bourgs, on a disposé d’étranges constructions devant lesquelles on passe sans s’arrêter : des ronds-points, aménagés avec une obsession de la couleur locale. Ce film tourne autour de ces scènes de cartes postales où se mêlent huitres, parasols et femmes préhistoriques.


Les ronds-points sont une invention française « comme les droits de l’homme, le vaccin contre la rage ou le Minitel », assure le narrateur de Saintonge giratoire. S’il peut ainsi mettre sur le même plan des avancées historiques majeures et une technologie obsolète, c’est parce qu’il ne fait que pousser la logique qui présida à la création de ces œuvres urbanistiques, particulièrement en pays saintongeais. Mettant tantôt à l’honneur l’héritage romain, les gastéropodes, Ronsard ou une femme de Néandertal, ces créations dérisoires témoignent d’une fantaisie qui donne le tournis, d’une émouvante bizarrerie que l’on devine issue de relations contre-nature entre politique locale et aspirants artistes. Le simple fait d’étudier ces créations avec attention est presque subversive, tant elles sont vite prises à leur propre jeu, révélant la façon dont un territoire cherche à se représenter aux yeux du monde. L’effet est accru lorsque la voix (celle d’Eugène Green) adopte un ton précieux digne de la cour du Roi-Soleil – elle sera interrompue par une incursion de Luc Moullet, en forme d’hommage à ces modèles d’essais sarcastiques que sont La Cabale des oursins ou Imphy, capitale de la France. Pourtant, sous la dérision, pointe une envie plus innocente : celle de parcourir un territoire, de le regarder autrement. Saintonge giratoire montre ses coutures, par son montage-son abrupt et autres cahots de caméra, et porte ainsi la trace d’une aventure collective guidée par une sincère curiosité.

Olivia Cooper-Hadjian

Lire aussi l’entretien avec Quentin Papapietro


Quentin Papapietro

Quentin Papapietro, né à Limoges en 1987, diplômé de l’ESAV et ancien critique aux Cahiers du cinéma, a tourné en dix ans une vingtaine de courts-métrages, dont 40A service Pierrick (2020) diffusé sur Canal+, ainsi que deux longs métrages, Water Music (2014) et En Fumée (2018). Ses films, sélectionnés dans d’importants festivals en France et à l’international, ont fait l’objet d’une mini-rétrospective à la Cinémathèque Française en 2019.

Production :
Hippocampe Productions (Jordane Oudin)
Image :
Nicola Bergamaschi
Son :
Ona Ballo Pedragosa
Montage :
Louis Séguin
Contact copie :
Hippocampe Productions - contact@hippocampe-productions.com

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