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The Inheritance

Ephraim Asili
2020 États-Unis 100 min

Les histoires respectives de l’organisation MOVE, fondée à West Philadelphia, et du Black Arts Movement s’entrelacent avec des dramatisations de la vie du réalisateur à l’époque où celui-ci était membre d’un collectif d’activistes noir. En s’articulant autour de ce qu’Asili a pu décrire comme une « reconstitution spéculative » de son expérience dans un collectif de West Philadelphia, les vies scénarisées des acteurs sur le plateau sont entrecoupées par des interventions de membres de MOVE (Debbie Africa, Mike Africa Sr et Mike Africa Jr) et de poètes-activistes (Sonia Sanchez et Ursula Rucker).

De quoi le premier long métrage d’Ephraim Asili présente-t-il l’héritage ? Une réponse est donnée d’emblée : c’est une lourde malle qui s’ouvre sur un trésor de livres – Alice Walker, James Baldwin, Charles Mingus, Malcolm X. C’est une série de pochettes de disques où ont été gravées les voix des luttes noires  – W.E.B Du Bois, Angela Davis, Margaret Walker. C’est surtout une maison entière dans les quartiers ouest de Philadelphie, que Julian (Eric Lockley) reçoit après le décès de sa grand-mère et où il invite son ex Gwen (Nozipho McLean) à s’installer avant que, par un simple effet boule de neige, d’autres ne les rejoignent pour former une communauté baptisée La maison d’Ubuntu. Asili donne à ce départ de fiction le tour le plus pragmatique possible, dédaignant les ficelles de scénario pour privilégier la logique d’une reconstitution spéculative, inspirée d’une expérience de vie dans un collectif noir marxiste. Non sans autodérision, le reste du film est consacré à inventer des règles de vie commune, meubler et décorer la maison, faire de la musique et des smoothies, lire des textes révolutionnaires et de la poésie. À se lier surtout à d’autres histoires, d’autres luttes, d’autres temps, d’autres écritures, d’autres pratiques. Ainsi nos acteurs deviennent-ils l’audience d’intervenants qui, eux, ne jouent que leur propre rôle. Telles les poètes Sonia Sanchez et Ursula Rucker, ou encore ces survivants de l’organisation MOVE, une communauté noire fondée dans les années 1970 à Philadelphie et violemment persécutée par la police. La question de l’héritage, on le voit, c’est précisément celle qui cherche à remarier la théorie et la pratique, la fiction et le réel, le dedans et le dehors. Une fiction pour poser le cadre expérimental d’une exploration politique ; une maison pour catalyser les luttes du passé dans le présent.

Antoine Thirion

Production :
Victoria Brooks, Ephraim Asili
Image :
Ephraim Asili, Ryan Jenkin
Son :
Stephen McLaughlin
Montage :
Ephraim Asili

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